Scènes de violence ordinaire

… ou comment pour finir je n’ai pas porté de jupe ce jeudi 25 novembre.

La journée de la jupe a fait débat. Du moins, sur les blogs et les réseaux sociaux. Car dans la rue, je n’ai rien vu. Ni à l’école du monstre (à « l’heure des mamans », càd à la sortie des classes, admirez l’expression…), ni dans le tram, ni sur les trottoirs. La seule femme que j’ai vu porter une jupe avait 70 ans bien sonnés, elle était élégante, coquette mais ne m’a pas semblé démesurément militante (même si, elle, le MLF, elle a dû le voir naître).

Bref, constat, ça n’a rien changé dans la rue. Peut-être aussi que les femmes à Bruxelles n’avaient pas été autant impactées (oui, je sais, c’est un anglicisme, y’a un mot français correct pour cela mais j’aime bien celui-ci, voilà) que les Françaises par l’action en question. Mais n’allez pas pour autant en déduire qu’elles ne sont pas militantes ni concernées, didjû. Lire la suite

De la jupe au viol, du viol à la jupe

Je suis dans une maison. C’est la maison de mon adolescence. Je suis en bas, dans la pièce qui donne sur le jardin. J’ai regardé dans l’armoire et trouvé des chocolats et des gaufres, je souris en me disant que ma mère a fait un stock.

En haut de l’escalier, quelqu’un fait du bruit, marche dans le salon.

Je demande qui est là, joyeusement, pensant que ma mère est rentrée et que je vais pouvoir lui demander, pour les gaufres. Et puis, en un éclair, je me rends compte que cela ne peut pas être elle, elle n’est pas censée être là, à cette heure. Du coup, je me tais, je retiens mon souffle, espérant qu’on ne m’a pas entendue… Lire la suite

Moment de grâce

Bon, je l’ai déjà dit, j’ai un soucis avec les mariages. Avec les PACS aussi, d’ailleurs (c’est quoi la différence ??? Hop, pas de jaloux, j’ai un soucis aussi). Bref tous les trucs où on signe quelque chose et on jure que ça durera toujours, ça me fait ricaner.

Quoi, chuis mariée ? Ben justement, je sais de quoi j’cause !

Bref, là, ce week-end, mon cousin se mariait. Mon p’tit cousin, qui n’allait jamais grandir (mais pourquoi tous les bébés de ma famille s’évertuent à devenir adultes un jour, nom de nom ?) a décidé d’épouser la femme de sa vie. Notez, il a pas eu tort dans l’absolu, elle est top, la femme de sa vie.

Donc, il s’est marié. Lire la suite

On dit merci qui ?

Ha vous avez vu ?

Oui, vous avez vu.

C’est plus pareil, ici. C’est tout changé, chamboulé, retourné, sens-dessus-dessous-hé (c’est pour la rime).

Pourquoi ? Parce que !

Lire la suite

Eté tout pourri

(Avis de service : non, cet article ne traitera pas de météo malgré son titre évocateur. Pour avoir plus d’infos sur ce sujet, veuillez suivre les tweets de Didier Reynders qui informe régulièrement la population belge francophone de l’état du ciel ou, plus prosaïquement, rendez-vous sur le site meteo.be qui donne peu d’espoir à ceux qui penseraient que notre pays est en passe de devenir une république bananière, en tout cas, au niveau du climat)

« Tu sais quoi ? Une amie m’a dit que, là, cet été, au niveau de la carte du ciel, c’était vraiment un été pourri. Plein d’influences négatives, une énergie basse, des difficultés, un climat lourd… Et pour tout le monde. Personne n’est épargné ! »

J’ai beau ne pas croire en l’astrologie (sauf quand ça m’arrange et qu’on me dit que George Clooney est l’homme de ma vie, rigolez pas, c’est exactement ce que j’ai lu cet été !), j’ai poussé un ouf de soulagement en entendant cette phrase dans la bouche d’une amie.

Lire la suite

Vivement l’automne !

Naaaan, je blague !

Heu, ou pas, en fait.

Ok, elle est belle, cette photo (et mon appli WordPress sur iPad refuse de la mettre en petit, j’en déduis donc qu’elle a une folle envie que vous en profitiez pleinement), je l’ai prise ce matin en descendant vers la mer (et non, je ne me la pète pas, je ne suis ni aux Seychelles, ni aux Baléares, juste à la côte belge un jour de grand beau temps), elle donne des envies de douceur (en plus, il ne faisait pas trop chaud, juste tout doux, tout bon), de rêverie, de sérénité et de paix.
C’est du moins ce que j’ai ressenti en la prenant.

Et c’est plutôt pas mal comme ambiance : paix et sérénité. Ça devrait me plaire, surtout pour l’instant.

Ben nan.

Non que j’aie des envies de fureur, d’orgies et d’excès (quoique…), mais la plage et moi, on n’a jamais été de grandes copines. Sur la plage, soit on bronze, soit on fait du sport, soit on lit. De ces trois occupations, une seule me plaît, et non, ce n’est pas « faire du sport ». Mais la lecture, c’est bien un temps. Après s’être tapé la totalité des « Piliers de la Terre » ( environ 1000 pages dans mon souvenir, souvenir qui date de 1990, vous m’excuserez donc s’il est imprécis), on se dit qu’on s’est tellement vautré sur une plage qu’on risque à l’avenir d’être systématiquement pris de tremblements convulsifs à la simple vue d’un innocent grain de sable. Rester sur une plage n’est donc plus une option envisageable (et lire un bouquin qui parle de cathédrales non plus, d’ailleurs, mais là, on s’éloigne du sujet).

Bref, la plage est à bannir.

Mais je l’aime bien, hein. En hiver, avec des bottes et une doudoune, je cours pour y aller. Chuis pas normale ? L’Homme est comme moi. Donc on est deux très anormaux profondément contents d’avoir trouvé leur alter ego passionné par les plages froides et désertiques. Ouf, sauvés.
Et on fait quoi en été ? On visite des villes. Des tonnes de villes. Le petit de l’Homme, à trois ans, avait déjà visité plus d’endroits que son instit, c’est vous dire.

Les villes sont splendides sous le soleil. Et la torpeur dans laquelle la chaleur les plonge, j’adore. Même l’odeur des villes me plaît, en été. Et en été, j’achète des magazines féminins (là, vraiment, je fais une razzia, en été, c’est permis, on n’est pas intello, en été, il fait beaucoup trop chaud pour réfléchir, en été) qui parlent des villes. L’été.

Donc voilà, elle est belle ma photo. J’ai même profité des chaises longues, si, si. Mais avec parcimonie et en me disant que, ouf, sous peu, je serai à Paris. Et qu’en automne, je serai à New York. Et là, d’un coup, je me dis… vivement l’automne !

Il est beau, votre papa…

S’il est des phrases qui marquent dans une vie, ce sont bien celles prononcées dans une morgue ou dans un funérarium. Elles se gravent dans la mémoire de manière indélébile, s’y enfoncent et font corps avec la chair même de votre cerveau.

Pour moi, ce fut la phrase prononcée par l’employée de la morgue qui, en refermant le frigo dans lequel était enfermé le corps de mon père, m’a dit « Il est beau, votre papa. Et vous lui ressemblez beaucoup. »

En une phrase, elle a dit plus que mon père en toute une vie. Elle a ressoudé des parties de moi qui s’étaient éparpillées en mille morceaux. Une inconnue, perdue dans une morgue au milieu du Bordelais profond, prononçait pile la phrase qu’il fallait…

La phrase qu’il fallait pour réconcilier une fille avec son père. Une fille qui, à ce moment-là, avait juste envie de hurler, de hurler contre ce père parti trop vite, parti trop tôt, parti trop mal.
Qui l’avait abandonnée pendant l’enfance et qui l’abandonnait encore, et de manière plus irrémédiable cette fois, aux marches de l’âge adulte. Injuste, injuste, injuste.

La vie est injuste. La mort l’est plus encore.

J’ai mis du temps pour comprendre que les papas ne choisissent pas franchement leur heure pour partir pour toujours. Personne ne choisit, en fait.

Que l’Homme l’apprenne à son tour me donne envie de pleurer.

Que le petit de l’Homme en fasse l’expérience un jour me mortifie.

Alors j’espère une chose, une seule petite chose (et je m’accroche à ma petite chose de toutes mes forces, là ), c’est qu’eux aussi, ils ont/auront une phrase gravée dans la tête, dans le coeur, dans les tripes, qui les soutiendra pour le reste du chemin à parcourir sans un père penché au-dessus de leur épaule. Pour les aider quand l’absence se fait un peu lourde.

« Il est beau, votre papa. Vous lui ressemblez beaucoup. »

J’ai ricané quand elle m’a dit cela, la dame. J’aurais dû lui sauter au cou et lui hurler merci.
Je le fais aujourd’hui : MERCI.

Quitter la scène…

… en silence et sans angoisse.

Avec des faux pas, des vrais pas, des pas en avant, des pas de côté.

Un air guogenard, un clin d’oeil, un sourire en coin.

Des coups d’éclats, des coups de maître, des coups de gueule.

Et de l’amour, surtout. De l’amour, de l’amour, de l’amour, beaucoup d’amour, tellement d’amour…

Un héritage qu’on lit dans les yeux de tes fils.

Merci… Merci Francis !

Vais-je aller voter ?

… est, je pense, la question qui m’obsède le plus depuis la chute de notre gouvernement (enfin, la dernière chute en date, quoi).

Je ne suis pas une activiste politique, ni engagée dans un parti quelconque. J’ai des amis qui le sont, je les admire car, perso, j’aurais bien du mal à adhérer à un parti et à composer avec les concessions d’usage qui découlent de cette implication (puisqu’aucun parti, jamais, ne correspond totalement à vos idées).

Eduquée en vraie démocrate (merci maman), j’ai toujours opté pour une démarche citoyenne : ai défendu l’obligation de vote, lu les programmes des partis, réfléchi à ce que je souhaitais, à ce qu’on me proposait et affirmé mon choix dans l’isoloir.

J’ai aussi été guidée par ma grand-mère. Cette dernière était fière de me raconter la toute première fois où elle avait pu voter. Fière de m’expliquer ce bonheur d’entrer dans l’isoloir. Cette joie qu’elle a ressentie au moment de déposer son vote, de s’exprimer pour la première fois sur l’avenir de son pays. C’était en 1948. Elle était née en 1911, faites le calcul, elle a donc pu voter pour la première dois à…

37 ANS.

Mon âge, pile mon âge aujourd’hui.

Je peux voter depuis mes 18 ans. Cela me semble complètement normal et banal. Mais, grâce à elle, j’ai toujours pris ce droit au sérieux. Si je n’ai jamais voté pour la même chose qu’elle (ben nan, c’est un peu le but de l’éducation : apprendre à ceux que vous élevez à penser par eux-même et à faire leurs propres choix), j’ai toujours eu à l’esprit cette conscience qu’elle m’a insufflée : « nous n’avons pas toujours eu le droit de vote, Marie ».

Oui, justement. Ce droit est sérieux. Justement…

Il y a quelques semaines, dans Le Soir, les personnes qui avaient exprimé l’idée de ne pas aller voter se faisaient traiter d’immatures. Certes, l’appel au boycott du scrutin de juin prochain (pour les Français égarés sur ce blog : la Belgique retourne aux urnes le 13 juin, c’est une belle date pour prouver au monde entier qu’on n’est pas superstitieux) était un appel viscéral, un cri de détresse, un aveu d’impuissance, un « merde » de ras-le-bol mais surtout, aussi, une vraie demande pour que les choses changent, que les voix soient entendues. Une vraie option à réfléchir pour certains.

Dont moi.

Et franchement, je ne rigole pas. Pour la première fois, je me suis franchement posé la question de savoir si j’allais aller voter. Torture. Et je ne me sens en rien immature, bordel.

Juste une adulte qui deale avec les soucis du quotidien. Qui, comme tout un chacun, se rend compte qu’il y a de nombreuses choses à améliorer dans le quotidien belge surréaliste. Qui enrage contre la sclérose de certaines administrations, de certaines lois… Et qui hallucine devant les propos inconsistants ou irresponsables des politiciens qui la dirigent (dont, au passage, ceux pour lesquels elle a voté, olé !). Et parfois, aussi, devant des propos clairement irrespectueux et racistes.

Et là, on me joue un scénario digne de la cours de récré du petit de l’Homme. Le sable et les pelles en moins.

Je me sens en droit de remettre certaines choses en question. Même mon droit -devoir- de vote.

Pour finir, ils en ont fait quoi de cette fierté que ma grand-mère éprouvait ? De cette voix qu’elle était heureuse de donner ? Quoi ?

Et pourtant, après mûre réflexion, je me suis dit que moi, je ne voulais pas fouler au pied cette fierté, cette chance. Donc j’irai voter.

Mais si un matin de 1948, ma grand-mère, 37 ans, se tenait dans la file d’un bureau de vote ucclois, heureuse, convocation à la main et bien décidée à exprimer son avis…

ce prochain matin de 2010, moi, 37 ans, je me tiendrai dans la même file d’un même bureau de vote ucclois, avec la même convocation à la main… et complètement désemparée et démotivée face au choix que je vais devoir exprimer. Et en me demandant ce que je lui dirais, moi, à ma petite-fille…

Triste constat.

Triste, triste, triste constat.