Vos gueules #Alep

Envie de hurler.
De dégueuler.
D’arracher, de déchiqueter tout ce qui passe à ma portée.

Hier soir, j’étais au spectacle de Gui-home, ce jeune mec qui a réussi grâce au web, qui est devenu humoriste grâce à son talent et à la magie des réseaux sociaux.

En sortant du spectacle, j’ai rallumé mon téléphone.
La bataille finale d’Alep-est faisait rage et sur Twitter tout le monde pouvait y assister en direct.
La magie des réseaux sociaux à nouveau, en plein.
Et surtout chacun pouvait y aller de son analyse sur la situation pendant qu’un déluge de bombe tombait sur des femmes et des gamins.
Là, on ne peut plus parler de magie, mais carrément d’extra-lucidité.
Et d’indécence.

Pour ceux qui n’auraient eu comme info que les 3 phrases de ce matin dans les JT (qui ont, dans un bel ensemble, traité le sujet avec une analyse et profondeur qui laissent pantois), je vous résume la situation des deux camps qui s’affrontent, non pas sur le terrain (qui est juste une gros bourbier sanglant à l’heure qu’il est) mais sur les réseaux sociaux (qui… heu, non, je vais me taire) :

Les pro-rebelles :

– ce sont qui croient que la situation n’est pas toute blanche, ni toute noire, qu’il n’y a pas les tous mauvais d’un côté et les ultra-méchants de l’autre. En gros, et pour faire court, pour eux, en Syrie, il y a effectivement Daesh (ou l’EI) et l’armée Syrienne qui se font face, mais il y a aussi les « modérés » (le mot est entre parenthèses car c’est ce même terme entre parenthèses qui apparaît dans les média) qui sont contre Assad (rappel : la guerre en Syrie a débuté suite à un soulèvement du peuple syrien contre la dictature d’Assad, car oui on peut parler de dictature) mais qui ne sont pas pro-Daesh. Modérés, donc.
– les rebelles sont encerclés dans Alep-est après avoir été attaqués par l’armée syrienne d’Assad et l’armée russe de Poutine (qui sont alliés)
– le gouvernement français actuel est pro-rebelles et les soutient, mais ne bouge pas.
– le gouvernement de Barak Obama est pro-rebelles également, mais ne bouge pas plus.
– les média traditionnels sont en contact avec les gens coincés dans la poche qui résiste (et dans laquelle il y a aussi des femmes et des enfants, nombreux) et relayent leurs appels au secours car l’armée qui les encerclent ne leur permet pas d’évacuer.
– de nombreux comptes Twitter racontent l’horreur de la situation sur place, font part de la violence des soldats, état de morts nombreux, d’exécutions sommaires de femmes et enfants par l’armée qui reprend les quartiers insurgés.
– l’ONU ne bouge pas (forcément, Poutine met son véto) mais relaye son effarement face aux exactions commises sur place (et en suivant des rapports qu’ils reçoivent des gens sur le terrain).

Les pro-Assad et Poutine :

– ce sont ceux qui croient que la situation est plus tranchée que la version « officielle », qu’en fait, les rebelles sur place sont tous des Islamistes, proches de Daesh (ou même de branches faisant partie de Daesh) et qu’ils luttent pour instaurer un nouveau califat. Qu’il faut donc les anéantir, quel que soit le prix à payer.
– pour eux, les rebelles sont encerclés dans ce qui reste d’Alep-est mais le reste de la ville n’attend que la victoire d’Assad et de Poutine pour rétablir la paix.
– François Fillon (en course pour la présidence de la France) est en faveur de Poutine, ainsi que Marine Le Pen.
– le futur gouvernement de Donald Trump (et Donald Trump lui-même) est en faveur de Poutine et d’Assad également.
– les média « underground » sont en contact avec les soldats et civils sur le terrain, ceux qui attaquent les rebelles, et relayent leur version. Ils ne nient pas qu’il y a des femmes et des enfants dans la poche de résistance mais expliquent que ces derniers ont soit choisi de rester avec les combattants, soit sont pris en otage par les rebelles qui les descendent s’ils veulent sortir et qu’ils ne sont donc pas coincés par l’armée mais par les rebelles qui les utilisent comme boucliers humains (les deux explications co-existent, même si elles sont clairement antinomiques).
– des photos circulent sur Twitter de Syriens qui se réjouissent que l’armée d’Assad ait presque libéré Alep-est (une question d’heures et encore)
– les pro-Assad et Poutine dénoncent la propagande des comptes Twitter des insurgés et des média traditionnels. Ils ne mettent pas en cause que la guerre fait rage, mais démentent les exactions commises et le nombre élevé de morts.

CHOISISSEZ VOTRE CAMP, m’sieurs-dames !

C’est d’autant plus simple qu’on est derrière un écran et que notre vie n’est pas menacée.
EASY.

Les media « underground » renvoient la balle aux média traditionnels : pour eux, les informations des média traditionnels sont orientées selon un agenda.
Selon eux, les média traditionnels jouent le jeu des multinationales et du système (je commence un tout petit peu à en avoir assez des mots-valises qui ne veulent rien dire, je vous avoue, mais passons…) et suivent l’agenda dicté par ces dernières, par les US d’Obama et par les « bisounours » qui ne comprennent rien à ce qu’il se passe.

Mais autant je peux entendre les deux points de vue que je vous ai écrit plus haut…
autant je sature de l’hypocrisie du deuxième camp quand je le vois affirmer qu’il a la seule et unique version « vraie », comme si Assad et Poutine étaient des ONG, avides seulement de liberté et de paix.

DONC on résume :

LES DEUX CAMPS SUIVENT UN AGENDA
(depuis quand, sur cette Terre, on fait la guerre pour la « beauté » du geste, mmmmmh ?)

C’est quand même plus honnête dit comme ça.

Et du coup, me direz-vous ? Nous, on en pense quoi ?

Vous, j’en sais rien, comme écrit plus haut, choisissez votre camp.

Ou ne le choisissez pas.
Du moins, pas en ces termes là.

Je ne suis pas à Alep.
Je ne suis pas sur place.
Et je vous parie tout ce que vous voulez que, si ça tombe, même sur place, je ne saurais pas de quel camp je suis.
On ne saura ce qu’il s’y passe vraiment que plus tard, si on le sait un jour.
L’Histoire rendra son jugement.

Alors je vais faire ce que je vous expliquais déjà dans un autre article, je vais choisir mon camp avec ce que je sais être sûr : les valeurs que tout être humain devrait mettre en avant.

Mon camp est celui du peuple d’Alep-est.
De ces mères qui voient crever leurs enfants sous leurs yeux.
Qu’ils soient 100 ou 5000 ne change rien à l’affaire.
Que ce soit par l’un ou l’autre camp ne change pas la létalité des bombes.
Qu’on discute à n’en plus finir de qui a raison et qui a tord ne rend pas leur mort plus douce.
On ne danse pas sur des tombes.

A l’heure où je vous écrit ces lignes, à la minute, à la seconde où vous les lisez, il y a des gosses qui crèvent, par un camp ou par un autre, et personne n’a réussi à les sauver.
Elle est là, la vérité.
Il est là, le naufrage.

Alors vos gueules.
Vraiment.
VOS GUEULES.