Aux enfants morts sans raison…

Je dois courir, j’ai encore du boulot mais je le terminerai plus tard.

Ne pas arriver en retard surtout, ne pas arriver en retard.

Il fait froid, il pleut à verse, je suis crevée… Mais le petit de l’Homme m’attend. Avec impatience. Heureux. Excité.
Ne pas lui faire défaut surtout.

J’arrive à l’école, je le cherche, je m’énerve déjà. Il y a un monde de fou. Partout. Un bruit constant.
Je veux la paix. Je me dis que j’ai encore du boulot, des choses à vérifier, que j’ai autre chose à faire que de venir à une fête d’école.

Je tourne en rond en le cherchant, rencontre d’autres parents, ma cousine qui a ses enfants dans la même école…
Je suis crevée. On est vendredi soir, je veux la paix, je veux la paix. Lire la suite

On va les laisser crever ?

« Aujourd’hui, on n’a plus le droit, ni d’avoir faim, ni d’avoir froid ! Dépassé, le chacun pour soi, quand je pense à toi, je pense à moi ! »

Mon frère a émergé comme une bombe de la salle de bain, trempé, enroulé dans sa serviette de bain, petit bouchon de 9 ans, chantant à tue-tête un truc que je ne connais pas, il s’est planté en plein milieu du hall.

« Et, tu reviens ici, toi ! »

Ma mère l’a suivi et ramené vers la chaleur de la salle de bain, elle lui lave les oreilles et lui intime l’ordre de se sécher et d’enfiler son pyjama.

Je me suis postée en embuscade derrière la porte de la salle de bain et m’enquiers « C’est quoi, la chanson que tu chantes ? »

« Un truc que j’ai appris en classes vertes ! »

J’enrage, il connaît une chanson que je ne connais pas, qui a l’air chouette en plus, il me faut les infos.

Je le poursuis jusque dans sa chambre : « Mais elle s’appelle comment cette chanson ? »

« Heu, ‘La chanson des restos’, je crois… »

« Mais c’est de qui ? »

« Ben, heu… ‘des restos’ ? » Lire la suite

Tu seras un homme, mon fils

« Dis, je peux te dire quelque chose que je peux pas te dire, en fait ? »

Je le regarde, surprise.

« Heu… Oui ? »

« Bon, ben, voilà… »

Il déglutit. Il s’arrête. Il fixe les cailloux du chemin sous ses pieds.

« C’est quoi ce que tu ne peux pas me dire ? Et pourquoi tu ne peux pas me le dire ? »

Je me mords les lèvre, faut que j’arrête de l’assassiner de questions sinon il ne parlera jamais. Lire la suite

Scènes de violence ordinaire

… ou comment pour finir je n’ai pas porté de jupe ce jeudi 25 novembre.

La journée de la jupe a fait débat. Du moins, sur les blogs et les réseaux sociaux. Car dans la rue, je n’ai rien vu. Ni à l’école du monstre (à « l’heure des mamans », càd à la sortie des classes, admirez l’expression…), ni dans le tram, ni sur les trottoirs. La seule femme que j’ai vu porter une jupe avait 70 ans bien sonnés, elle était élégante, coquette mais ne m’a pas semblé démesurément militante (même si, elle, le MLF, elle a dû le voir naître).

Bref, constat, ça n’a rien changé dans la rue. Peut-être aussi que les femmes à Bruxelles n’avaient pas été autant impactées (oui, je sais, c’est un anglicisme, y’a un mot français correct pour cela mais j’aime bien celui-ci, voilà) que les Françaises par l’action en question. Mais n’allez pas pour autant en déduire qu’elles ne sont pas militantes ni concernées, didjû. Lire la suite

De la jupe au viol, du viol à la jupe

Je suis dans une maison. C’est la maison de mon adolescence. Je suis en bas, dans la pièce qui donne sur le jardin. J’ai regardé dans l’armoire et trouvé des chocolats et des gaufres, je souris en me disant que ma mère a fait un stock.

En haut de l’escalier, quelqu’un fait du bruit, marche dans le salon.

Je demande qui est là, joyeusement, pensant que ma mère est rentrée et que je vais pouvoir lui demander, pour les gaufres. Et puis, en un éclair, je me rends compte que cela ne peut pas être elle, elle n’est pas censée être là, à cette heure. Du coup, je me tais, je retiens mon souffle, espérant qu’on ne m’a pas entendue… Lire la suite