Hier après-midi, sur twitter, un politicien flamand, Monsieur Vincent Van Quickenborne a lancé cette superbe constatation:
Dankzij @le_bux @johannemontay heb ik in 100 tweets meer geleerd over Wallonie dan 10 jaar politiek. Faut le faire. Et vous wallons?
Pour nos amis qui ne parleraient pas flamand, je traduis : Grâce à @le_bux et @johannemontay, j’ai appris plus sur la Wallonie en 100 tweets qu’en 10 ans de politique. Faut le faire. Et vous wallons ? (en français dans le texte)
On passera sur le fait que le « et vous wallons ? » me fait un peu penser à « et vous, juifs ? » digne d’une réplique de la Liste de Schindler parce qu’on a collé des points Godwin pour moins que cela. On lui trouvera l’excuse que, en 140 caractères, il faut bien être synthétique. Néanmoins, le monsieur n’a quand même pas peur du stéréotype bien stéréotypant (ça existe des points pour ça ?). Y’a pas QUE des Flamands et des Wallons en Belgique. Cette dichotomie serait bien pratique mais elle n’est, hélas pour ce brave homme, pas une franche réalité belge.
Prenons moi, par exemple. Wé, au hasard. Complètement au hasard.
Le papa de ma maman vient de Namur, il est donc wallon. Il parlait français. Jusque là, simple.
La maman de ma maman venait de Namur aussi. Wallonie toujours. Français encore.
Ils se sont rencontrés et se sont mariés à Bruxelles. Qui, selon monsieur Vincent (et bon nombre de Flamands) n’est plus du tout, du tout la Wallonie. Et ils y ont procréé. Leurs enfants sont nés à Bruxelles, ont grandi à Bruxelles et ne connaissent de Namur que la Citadelle et que c’est pas mal comme ville pour y faire du shopping.
La maman de mon papa était bruxelloise. Elle parlait le Ucclois. Si, si. Un patois flamand. Mais elle a été à l’école en français. Parfaite bilingue, elle se définissait comme Bruxelloise, donc. Pure Bruxelloise. La Wallonie, elle y allait en vacances. C’était exotique.
Le papa de mon papa, lui, était flamand. De Flandre. Et il parlait flamand. Voici de quoi faire plaisir à monsieur Van Quickenborne, mon grand-père était un homme pas compliqué. Et la Wallonie, il y allait aussi en vacances, mais c’était quand même moins bien que l’Italie (il y avait pas mal d’Italiens aussi, certes, mais plus de soleil).
Sauf que… mon grand-père flamand, il a épousé une Bruxelloise. Et que, s’ils parlaient flamand tous les deux, ils ont décidé d’élever leurs enfants en français. Ca faisait plus « chic » (c’est pas moi qui le dit, c’est ma grand-mère qui me l’a répété toute sa vie). Enfants qui ont néanmoins appris à parler le flamand avec leurs cousins. Et qui, donc, étaient bilingues et… bruxellois ! Qui, en plus, allaient en vacances en Flandre et en Wallonie. Des belgique-trotters.
Tout le monde me suit ? J’ai perdu personne en route ?
Ma maman, bruxelloise, a rencontré et épousé mon papa, bruxellois. Ils m’ont élevée en français (je vais devoir leur en vouloir toute ma vie, ils ont fait de moi une francophone, ils n’ont pas réfléchi aux terrifiantes implications que cela allait avoir sur ma vie à moi, parents indignes).
Et, là, monsieur Vincent Van Quickenborne me demande si j’ai appris quelque chose sur les Flamands grâce à Twitter, moi, la Wallonne-qui-parle-français.
Ben… Ecoutez…
J’veux pas être mauvaise, hein. Mais j’aimerais d’abord qu’on me donne l’exacte définition de « Wallon ». C’est un peu comme pour les Juifs, faut au moins deux ancêtres wallons dans la lignée ? (hop, un point Godwin, un !) Nan parce que si c’est ça, je coche, hein, fichez-moi une étoile, je rentre dans les critères (et un troisième point, youplààà !). Sauf que j’ai deux flamands aussi. Ca se corse. Et n’allez pas dire à mon grand-père qu’il n’était pas flamand, il aurait pas aimé. Ma grand-mère, elle, hurlait qu’elle ne l’était pas, flamande, mais bon, quand elle s’énervait, c’était quand même bien dans cette langue-là…
Et au final, si on relit bien toute l’histoire de ma famille, le fait que je parle français tient, en fait, un chouïa du hasard … La vie comme elle va, rien de plus, rien de moins.
Chuis un tutti-frutti.
Mais néanmoins, va falloir séparer les Flamands des Wallons, c’est vital pour que le pays survive me souffle-t-on…
Bien. Qui prend les seins ? Qui prend les jambes ?
Et faites gaffe, vous trompez pas, une fois le choix fait, on ne peut plus changer : le territoire, c’est le territoire !
PS: chuis par contre terriblement contente que M. Van Quickenborne apprenne des choses sur les francophones qu’il ne connaissait pas grâce à Twitter. Et on ira encore me dire que Twitter, ça sert pas, après ça !