Autant je prends souvent les transports en commun le soir en semaine, autant le vendredi soir, ça m’arrive plus rarement. Et c’est dommage. Car prendre les transports en commun un début de week-end, ça vous permet de comprendre vos semblables (ou pas…).

Bref, ce vendredi, l’Homme ayant une soirée de son côté et y allant avec sa bagnole, j’en ai profité pour prendre le tram sans râler du tout (ok, un peu quand même, mais y neigeait, quoi !) et me rendre à la soirée Very Important Blogs de Skynet (dont on peut voir la vidéo ici avec des bouts de moi dedans).

Autant les autres soirs, le tram est bondé de travailleurs harassés, autant le vendredi soir, il est rempli de gens qui ne sont pas pressés de rentrer chez eux.

Pour preuve, ces deux étudiants de 18-20 ans qui discutent le coup :

« On fait quoi, ce soir ? »

« Chais pas, j’ai pas de plan, là »

« Rien en vue. Tiens, t’as des nouvelles de L. ? »

« Nan, aucune. Mais plus envie, là. Je l’ai trop vue. Tiens, et toi, tu sais, la meuf de la St V (fête estudiantine en Belgique, ndlr) ? Tu l’as rappelée ? »

« La meuf de … ? Qui ? Ha oui, celle-là ! Ha non, pas encore. Ha ouais, elle devient quoi, celle-là ? Je vais peut-être la rappeler un jour… »

« T’as son num ? »

« Wé, elle me l’avait donné… »

« Ha ben, moi aussi, elle me l’avait donné, tiens »

« Nan ! Ha ! Cool… (on voit bien qu’il pense tout le contraire), on devrait l’appeler tout de suite, tiens. On sait quand même pas quoi faire ce soir. »

« Wé, bonne idée, j’l’appelle ? »

« Non, je vais le faire ! »

… « Allô ? Salut ! Tu te rappelles de moi ? Oui, c’est moi ! Tu sais, à la St V ! Ouiiii, c’est ça ! Pourquoi je t’appelle maintenant ? Ha… Ben écoute, en fait, j’avais perdu ton num, tu vois et, là, chuis avec mon pote, tu sais, celui à qui tu as donné ton numéro aussi. Et je lui parlais justement de toi, alors il m’a donné ton numéro. Tu me manques, tu sais, j’arrête pas de penser à toi. C’est dingue. Tu fais quoi ce soir ? Non, comme ça, on pourrait se voir ? Ca te tenterait ? Parce que, vraiment, tu me manques, là. J’ai envie de te voir, j’arrête pas de penser à toi, tous les jours, tous les jours. Ha ? Ca va pas ce soir ? T’es sûre ? Allez, fais un effort, tu me manques vraiment, tu sais ! J’te jure, je veux te voir ! Non mais sérieux ! Allez, t’es pas cool, je pense à toi tout le temps ! Faut qu’on se voie ! Pas ce soir… On se rappelle une autre fois… Wé, ok… T’es sûre ? J’te jure, tu me manques ! Oui, ok, à une autre fois alors… Ok… Bye. »

Silence.

Ca s’appelle un râteau.

Je me dis que c’est mérité et je me lance dans une diatribe silencieuse contre ces mecs de 20 ans, pas fichus d’être honnêtes un quart de seconde avec une nana, et que, ouf, la nana en question l’a vu venir et s’est pas laissé embobiner. Couillons de mecs, va.

Ils descendent. Deux filles montent à leur place.

Elles ont 16 ans grand max. Elles discutent de leurs cours, leurs copines, du lycée. Il fait froid, rappel. Bruxelles est sous la neige. J’ai deux pulls, une doudoune, une écharpe, des bottes fourrées et un jeans. Hé ben, j’ai l’air con. Elles ont aussi une doudoune, si, si. Mais grande ouverte. Et en dessous, un petit top à bretelles décolleté jusqu’au nombril. Sur un jeans taille-basse qui met en valeur leurs 35kg toutes habillées. Et pas l’ombre d’une chair de poule, ni d’une peau bleuie par le froid. J’admire et j’envie.

(Et, là, j’ouvre une parenthèse et m’adresse à tous les climatologues du monde : vous aviez peur des bouleversements climatiques à venir ? Cessez de paniquer, arrêtez les sommets mondiaux, le monde est prêt, le changement est en marche. On peut entrer tranquilou dans une nouvelle ère glaciaire : les générations qui nous suivent sont parées, les ado peuvent se balader sans soucis nombril à l’air par -10°. C’est beau, l’évolution.)

Et moi, j’ai l’air d’une vieille dépassée. J’ai d’un coup trop chaud dans ma doudoune.

Elles discutent de soirées, je les trouve touchantes. A moitié nues, mais touchantes.

Soudain l’une d’elle s’exclame : « Ho, je t’ai pas encore raconté la soirée de la semaine passée ! Tu sais, avec mon cours de sport ! C’était diiiiiiingue. Tu sais, ma copine M. ? J’y étais avec elle. Et, là, elle s’est fait un paquet de mecs, je te raconte même pas ! C’était une soirée de folie ! Vraiment une super bonne soirée, quoi ! »

Je les trouve toujours à moitié nues. Mais plus touchantes du tout.

Et force m’est de revoir mon jugement sur les-mecs-ces-salauds et les-filles-ces-victimes-innocentes. J’ai tout faux. Je le savais, mais je l’avais oublié. Pourquoi ?

Parce que je ne prends plus assez le tram le vendredi soir !

A l’avenir, rappelez-vous, si vous vous rendez compte que vous devenez un tantinet trop romantique ou trop amoureux, n’hésitez pas, un coup de tram, de bus, voire de métro, l’affaire est réglée.

Et là, dans le match « filles-mecs, un vendredi soir sur la Terre », c’est un partout, balle au centre !